Gendarme motocycliste depuis plus de sept ans en Bretagne, Lucie enchaîne les kilomètres en uniforme. Mais c’est en solo, casque vissé et sacoches prêtes, qu’elle vit ses plus beaux voyages. Portrait d’une motarde qui a fait de la route une manière d’exister : entre rigueur du métier et quête de liberté.

Tracer sa propre voie : le parcours exigeant d’une motarde déterminée
À 34 ans, Lucie n’a jamais choisi les lignes droites. Motarde passionnée, elle intègre en 2017 la gendarmerie motocycliste après un parcours sélectif où l’exigence est maître mot.
« Cinq jours de présélection à Fontainebleau : maniabilité, technique, observation… Cinq jours pour prouver ce qu’on a dans le ventre et dans la tête. »
Une fois admise, elle enchaîne avec trois mois de stage intensif : roulage quotidien, tous terrains, tous temps, toutes disciplines.
Un apprentissage total, aux côtés d’instructeurs issus pour certains de la Garde républicaine.
« J’ai roulé avec des pointures. Leur niveau est incroyable. Inspirant. »
Le Finistère : terrain d’opérations… et premier territoire d’exploration
Bretonne d’adoption, Lucie est affectée à une unité motorisée du Finistère. Une localisation qui, comme souvent dans la gendarmerie, répond aussi à des choix budgétaires : la formation moto coûte cher, et les départements cherchent à garder leurs motards formés.
Entre escortes, interventions rapides et surveillance routière, la moto rythme son quotidien.
Mais c’est en dehors de l’uniforme qu’elle va redécouvrir le vrai sens de rouler.


Le déclic du voyage : rouler pour se reconstruire
Lucie a toujours roulé, mais sans véritable idée de voyage. Ce sont des bouleversements personnels — mutation refusée, séparation, vente de sa maison — qui déclenchent un besoin d’ailleurs :
« J’avais besoin d’espace. D’avancer. Alors je suis partie. »
Elle achète d’abord une Triumph Tiger 1200 Rallye Pro, puis opte pour la Tiger 900, plus légère et adaptée ses envies d’aventure. C’est le début d’une nouvelle relation avec la route : plus libre, moins planifiée. Bretagne, Vosges, Pyrénées, Dordogne… puis bientôt Auvergne, Cévennes, Ardèche. Chaque itinéraire devient une respiration.
« Ces escapades me nourrissent autant qu’elles m’apaisent. J’en ai besoin. »
Tiger 900 : la moto qui lui ouvre toutes les routes
Trop lourde à manœuvrer à l’arrêt, la Tiger 1200 laisse vite place à une Tiger 900 au châssis plus agile.
108 chevaux, légèreté, polyvalence : l’outil parfait pour les virées solo, les pistes, les épingles en montagne.
Côté bagagerie, pas de valises aluminium. Elle choisit une solution semi-rigide innovante : des sacoches gonflables à l’impact, façon airbag, solides et esthétiques.

Rouler pour le travail, rouler pour soi : deux mondes opposés
Au travail, elle pilote des RT 1200/1250 ou des FJR, machines efficaces mais strictement utilitaires.
« Sur la moto de service, je fais mon job. Sur ma Tiger, je suis moi. »
Même fatiguée de sa journée, elle repart souvent en solo au coucher du soleil. La route redevient un espace de respiration.
Au cœur de l’action : urgence, interventions et moments forts
Être motocycliste en gendarmerie, c’est aussi faire face aux accidents, au secours, à la détresse humaine.
Elle se souvient notamment des incendies dans les monts d’Arrée :
« Traverser les fumées pour évacuer des habitants… c’était pesant. Inoubliable. »
Mais il y a aussi les moments lumineux, comme ses détachements sur le Tour de France Femmes, aux côtés de la Garde républicaine.
Une mission intense, rythmée par les étapes, le contact avec le public, l’énergie de la course.
Trails vs routières : le changement d’époque
Lucie observe une tendance claire : les routières laissent place aux maxi-trails, plus polyvalents.
« Avec un trail, tu peux tout faire. Les gens veulent de la liberté, de l’impro, de la nature. »
Elle-même pourrait un jour revenir à une grosse cylindrée, mais pour l’instant, la Tiger 900 coche toutes les cases.
Réseaux sociaux : discrétion et représentation du métier
Malgré son métier photogénique, Lucie reste discrète sur ses réseaux.
Elle souligne toutefois la modernisation de la communication institutionnelle, notamment sur Instagram.
« Ça humanise notre métier, souvent perçu uniquement comme répressif. »
La suite ? Toujours plus loin
Les projets s’enchaînent : Auvergne, Cévennes, Ardèche… et peut-être un trip au Sénégal avec une Ténéré louée sur place.
Pas pour l’exotisme. Pour la rencontre avec l’inconnu.
« Je ne cherche pas à prouver. Juste à ressentir. »
Lucie incarne une génération de motards pour qui la route n’est pas un simple trajet, mais un espace pour se reconstruire, se découvrir et exister pleinement.
Entre missions intenses, voyages solo et passion profonde, elle trace sa voie : libre, déterminée et toujours en mouvement.